Le Scarabée
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Les cannibales masqués

par ARNO*
mise en ligne : 11 juin 1999
 

Cette fois, c’est sûr, les cannibales bouffent vraiment de la merde.

Je vous livre la dépêche AFP telle qu’elle vient de tomber :

[AFP] PARIS, 11 JUIN 1999 - EUROPE, SANTE PUBLIQUE. Le porte-parole de la Commission européenne, Jamie Shea, a annoncé ce vendredi l’embargo total sur les exportations de viande humaine française. Cette décision concerne les exportations à destination du marché intra-communautaire et à destination des pays tiers. « Il fallait mettre les points sur les zis », a déclaré Jamie Shea, « les Français ont été prévenus depuis plusieurs mois qu’ils ne pouvaient continuer à nourrir leurs élevages d’humains avec n’importe quoi, nous avons été contraints de sévir ».

« C’est un coup dur pour les éleveurs français », juge Jean Guiaviagni, notre ministre de l’Agriculture, qui cherche cependant à dédramatiser : « aucune étude scientifique n’a prouvé que la consommation de viande humaine malade pouvait nuire à la santé des consommateurs, il n’y a pas lieu de s’alarmer ».

Au niveau européen, si l’on reconnaît l’absence de preuves scientifiques, on prône la prévention, en attendant la remise du rapport des experts mandatés : « depuis des années, les autorités françaises adoptent la politique de l’autruche : lorsque leurs champignons ont été contaminés par le nuage radioactif de Tchernobyl, elles ont assuré que leur consommation était sans danger ; lorsque les vaches sont devenues folles, elles ont expliqué que leur consommation était sans risque ; elles ont tenu le même discours au sujet des farines animales, des poulets contaminés à la dioxine et des produits transgéniques. Aujourd’hui leurs humains sont impropres à la consommation, et nous nous devons de protéger les consommateurs européens ».

Pierre Lazuly, président de l’ABUP (Association des bouffeurs d’utilisateurs de portables), confirme : « depuis des mois nous alertons les autorités sur les risques liés à la consommation de viande d’utilisateurs de mobiles : dans les élevages, ces bêtes ont un comportement incohérent et antisocial ; les vétérinaires ont constaté l’atrophie du cerveau et un taux élevé de cancers du neurone. On ne pouvait plus continuer à prétendre que la consommation d’une telle viande était sans danger ».

Secouant la tête, Alain Madelin fait entendre un autre son de cloche. Le président de Dictature Libérale s’emporte : « l’interventionnisme fait encore des ravages ; plutôt que de promouvoir le sens des responsabilités des entrepreneurs, on préfère réglementer, on va encore engager des fonctionnaires. Ca va augmenter les impôts et les charges qui pèsent sur les entreprises, fabriquer des chômeurs, l’Europe va encore prendre du retard sur les Etats-Unis. Ce que je veux, moi, c’est Europe de l’Internet ».

En revanche, l’association des Libres penseurs ne s’inquiète pas : « nous allons continuer à bouffer du curé ; certes nous allons limiter notre consommation d’agenouilliste d’origine française mais, de toute façon, les ecclésiastiques du sud de l’Europe ont beaucoup plus de saveur ; et la nouvelle filière en provenance de Pologne est très prometteuse ».

Le porte-parole du parti « Ruralité bien assumée » est, lui, très énervé : « les technocrates de Bruxelles utilisent cette excuse pour tenter, une fois de plus, de tuer nos traditions. Notre culture, c’est la viande humaine faisandée, la pâté cru, et ça, ils n’ont jamais pu l’admettre. Ils veulent nous imposer des viandes sans saveur, pasteurisées, d’origine étrangère ».

Les réactions à l’étranger sont nombreuses. En Allemagne, on rappelle que la viande française consomme de l’eau du robinet et utilise encore des casseroles au Téflon, autant de raisons de se méfier. En Angleterre, le journal The Sun titre : « les froggys bouffent n’importe quoi --- maintenant tout le monde le sait ». En Suède, c’est le manque d’hygiène des viandes humaines françaises qui est mis en avant. Aux Etats-Unis, dont la viande humaine fait déjà l’objet d’un embargo, les autorités fédérales viennent de saisir l’OMC et réclament un arbitrage : « tout ça, c’est parce que les Français ne mangent pas assez de nos bonnes bananes ; la viande humaine française consomme trop de valeurs anti-américaines, voilà ce qui arrive avec la viande rouge ». En Italie, en revanche, on s’inquiète des conséquences d’une telle décision ; pour éviter qu’une telle mesure ne s’étende à la péninsule transalpine, les autorités promettent des mesures plus strictes : les contrôles vétérinaires sur la viande de sportif italien devraient prochainement s’aligner sur les critères européens.

En France, Jean-Pierre Coffe rappelle les principes qu’il défend depuis toujours : « il faut revenir à des procédés d’élevage plus traditionnels, promouvoir la viande humaine de qualité. Les nourrissons allaités à la peinture au plomb, les étudiants farcis à l’amiante, les troufions élevés en batterie, les villageois nourris aux nitrates, c’est vraiment de la merde. Alors qu’un bébé nourri sous la mère, une bonne andouille élevée au grand air des campagnes, un castrat-tradition pour Noël, ça c’est de la bonne viande goûteuse, saine, de la vraie tradition française ».

Dernière minute : on apprend l’existence d’un trafic de viande de cannibales anglais nourris à la farine d’humain français. Les autorités britanniques cherchent à dédramatiser : « aucune étude scientifique n’a prouvé la nocivité de la consommation de cannibales nourris à la farine de Français qui a mangé du poulet belge élevé au boeuf anglais engraissé aux céréales transgéniques. Il n’y a pas lieu de s’alarmer. »

Reste que de telles affaires menacent toute la chaîne alimentaire des consommateurs européens de viande humaine. « Il faut rétablir la confiance des marchés », conclut Jean-Marc Sylvestre.

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